5 décembre, 2024
Entre l’OTAN et la Russie qui pourra gagner la possible confrontation directe à venir ?

Synopsis : la perspective que le conflit en Ukraine aboutisse à une guerre directe entre l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et la Fédération de la Russie ne saurait être entièrement écartée. Pour l’instant, le conflit se limite à une guerre par procuration en Ukraine entre la Russie et les États-Unis d’Amérique et est dans sa deuxième année. Jusqu’à présent, toutes les options utilisées par les protagonistes afin que le conflit prenne fin rapidement en faveur de l’un ou de l’autre se sont révélées être inefficaces. Toutefois, tout indique que le conflit sera long et pourrait réserver encore beaucoup de surprises. Par conséquent, on peut se demander ce que pourrait donner une guerre directe entre l’OTAN et la Fédération de Russie.

Une guerre entre l’OTAN et la Russie est-elle possible? 

Sans l’assistance occidentale, l’Ukraine aurait déposé les armes depuis. Or malgré le peu de succès enregistré par l’Ukraine dans sa tentative de chasser les russes, les Occidentaux ne cessent pas de considérer d’autres formes d’escalade pour la suite des hostilités. Pour les observateurs avertis, dans le lot des nouvelles options éventuelles, figure une intervention militaire directe d’une partie ou de la totalité de l’OTAN. D’une part, les Occidentaux ont eux-mêmes tendance à se fixer des restrictions dans l’escalade qu’ils n’ont pas de peine à violer par la suite quand ils sont confrontés à la perspective de l’éminence d’une défaite ukrainienne. D’autre part, la Russie a exclu jusque-là l’usage de l’arme nucléaire qui aurait pu dissuader les Occidentaux à ne pas dépasser un seuil dans l’escalade. Par conséquent, l’option d’une confrontation directe à cette étape-ci ne peut pas être exclue.

Le libéralisme par opposition au réalisme 

De plus, la politique des Occidentaux semble considérer uniquement et exclusivement leur conviction idéologique au détriment des réalités. Mais une idéologie dont les prémices ne sont pas issues de l’observation empirique des faits conduit à l’aveuglement et à l’échec. Cela était le cas du nazisme hitlérien mais aussi du bolchevisme léniniste et stalinien. Le néolibéralisme est sur une pente d’autodestruction et refuse de voir la réalité telle qu’elle est. 

Inefficacité des sanctions occidentales

Au début de la guerre en Ukraine, les Occidentaux étaient partis sur la base de l’hypothèque que la Russie allait s’effondrer économiquement et politiquement dès que les premières sanctions occidentales les plus dévastatrices lui allaient être imposées.

Après plus d’un an de sanctions économiques sans précédent dans l’histoire de l’humanité, la Russie est prédite pour connaître un taux de croissance économique de 2% en 2023 tandis que la plupart des pays de l’Union européenne, y compris l’Allemagne, sont en récession à cause notamment des sanctions qui constituent une autoflagellation. 

Les contre-offensives sans grand succès

La fameuse contre-offensive ukrainienne qui devrait permettre à l’Ukraine de se retrouver à la table de négociations avec la Russie dans une position de force a jusqu’à présent montré que si les Ukrainiens n’arrêtent pas de se faire massacrer il risque de ne rien rester de l’Ukraine.

Selon les estimations aussi bien du côté russe que de celui occidental, plus du quatre du potentiel militaire de l’Ukraine prévenant de l’assistance de l’OTAN est déjà détruit en environ dix jours de combats dans une contre-offensive prévue pour durer deux semaines.

Quelles options pour une escalade du côté des Occidentaux?

La nouvelle phase de l’implication des Occidentaux dans cette guerre par procuration sera peut-être l’envoi d’avions de combat F-16 aux Ukrainiens. Mais tous les experts, même ceux occidentaux, s’accordent sur le fait que cela ne changera pas le cours de la guerre et ne fera que participer à l’affaiblissement du potentiel militaire de l’OTAN qui progressivement est en train de perdre son avantage numérique.

Perte par l’OTAN de son avantage numérique

L’épuisement des stocks d’armes en Occident est un phénomène qui dégrade le potentiel militaire de l’Occident pour des décennies car les industries des États-Unis d’Amérique ne sont plus ce qu’elles étaient ni durant la Seconde Guerre mondiale ni au cours de la guerre froide. À la suite de l’ effondrement de l’Union soviétique et dans le contexte de la mondialisation, le processus de délocalisation de la production industrielle vers l’Asie a détruit le tissu industriel de l’Occident au profit des pays émergents de l’Asie. 

Par ailleurs, les sanctions économiques occidentales ont plongé la plupart des économies européennes dans une crise inflationniste causée par la flambée des prix des produits énergétiques dont la Russie est l’un des plus grands producteurs. La récession économique qui en résulte comme en Allemagne rendra davantage difficile la relance de l’industrie militaire occidentale pour peser dans la guerre.

Or du côté russe, l’économie a enregistré une baisse de l’inflation qui est à 2,9%, du taux de chômage tombé à un niveau record de 3,3% et une croissance économique de plus de 2% en avril 2023. Non seulement la Russie a redirigé ses exportations vers l’Asie mais la fuite des énormes capitaux issus de la commercialisation des produits énergétiques a cessé grâce à la confiscation des avoirs russes en Occident. Les hommes d’affaires et investisseurs russes sont donc obligés de réinvestir leurs argents dans leur pays afin de rester à l’abri de cette confiscation systématique des avoirs russes. L’industrie russe connaît alors une expansion sans précédent depuis la chute de l’Union soviétique en 1990. « Les entreprises russes de l’industrie de la défense travaillent en deux ou trois équipes, la production d’armes a augmenté de 2,7 fois, pour les plus demandées – de 10 fois. » – Propos de Vladimir Poutine, extraits de ses déclarations au Forum Économique International du Saint-Pétersbourg, le vendredi 16 juin 2023. 

Perspective d’une défaite occidentale

Dans un tel contexte, même une intervention militaire directe de l’OTAN ou d’une partie de l’OTAN dans cette guerre pourra tout vraisemblablement conduire vers une défaite pour l’Occident. Depuis la chute de l’Union soviétique et la première guerre du Golfe, les États-Unis d’Amérique n’ont fait que mener des guerres contre des pays qui n’ont rien en commun avec la Russie sur le plan militaire. Que ce soit en Afghanistan, en Syrie ou en Libye, les Occidentaux n’ont pas eu à faire face à des adversaires qui disposaient des moyens dont dispose aujourd’hui la Russie. En effet, après l’Irak, les États-Unis d’Amérique ont opté pour une doctrine militaire qui consiste à compenser le déficit du personnel militaire au sol par une large flotte aérienne. Mais cette doctrine a peu de chance de fonctionner avec un adversaire qui a des défenses antiaériennes les plus sophistiquées au monde. Les avions de combat ukraniens abattus par la défense aérienne russe sont estimés à plus de 400. De plus, la Russie a aussi sa flotte aérienne, qui certes, est incomparable à celle des États-Unis d’Amérique, mais peut servir à contrer les actions des chasseurs américains.

Avec la stratégie russe consistant à mener une guerre défensive ou d’attrition en face des contre-offensives, comment les forces occidentales parviendront-elles à percer les défenses aériennes, les champs de mines, les lignes de fortification et les tranchées de la Russie? Tout comme l’armée ukrainienne renforcée par les blindés occidentaux et entraînée par l’OTAN s’épuise à essayer de les franchir, les forces américaines ne pourront que buter sur ces défenses de l’armée russe.

Si une intervention directe de l’OTAN, par un heureux hasard, n’aboutit pas à une guerre nucléaire qui ne connaîtra ni perdant ni gagnant, elle pourra faire perdurer davantage le conflit et l’internationaliser. L’échelle des destructions et des victimes sera encore plus grande mais l’OTAN ne s’en sortira pas grandie mais affaiblie face à une Chine qui n’est pas pressée et prend tout son temps. 

Dans le cas d’une directe confrontation entre l’OTAN et la Russie, la Chine pourrait aussi commencer à s’impliquer dans le conflit en fournissant à la Russie tout ce dont elle pourrait avoir besoin. La Chine, ayant la plus base industrielle au monde, la perspective d’une victoire occidentale sera encore plus difficile.  

Par conséquent, la seule option réaliste qui s’offre est le dialogue visant à mettre en place en Europe et dans le monde une nouvelle architecture de sécurité qui soit juste et qui puisse refléter un certain équilibre des forces entre les grandes puissances.

Auteur de l'article :


Alfred Cossi CHODATON
alf2chod@gmail.com Diplômé en sciences et technologies de l'information documentaire, il est un écrivain et analyste indépendant.

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