8 septembre, 2024
Macron en mission pour recruter l’Afrique à bord de la coalition anti-Russe

En dépit de tout ce qui se passe, la France, en particulier, et l’Occident, en général, ne semblent pas comprendre pourquoi ils se retrouvent en guerre en Ukraine et comment ils peuvent s’en sortir. C’est ce qui explique le fait qu’ils persistent à endiguer la Russie. Mais les mêmes causes provoquent les mêmes effets. Le président français Emmanuel Macron, en tournée africaine au Cameroun, au Bénin et en Guinée Bissau, s’en est pris à la Russie dans la même rhétorique de déni qui a conduit à la guerre en cours. La persistance d’une telle attitude rendra impossible la perspective d’une solution diplomatique.

 

Il est clair que l’objectif principal de Monsieur Macron, dans ce contexte de guerre en Ukraine entre la Russie et l’Occident, est de dissuader les pays africains d’avoir des relations avec la Russie. En effet l’expertise de la Fédération de Russie en matière de sécurité se présente comme une alternative à la coopération militaire française jusque-là inefficace dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Mais au-delà de cet enjeu de coopération militaire, pour l’Occident, isoler la Russie du reste du monde est un objectif stratégique capital. C’est une vieille obsession de l’élite occidentale antérieure à la guerre en Ukraine et qui remonte même à l’époque de la Russie historique avant la révolution bolchevique d’octobre 1917. Durant la Première Guerre mondiale (1914-1918), il y avait quelque chose de profondément émotionnel et irrationnel qui avait conduit l’alliance franco-britannique et son adversaire qui était l’Allemagne impériale à se liguer contre les desseins russes dans les Balkans. Ce ralliement contre-nature s’est fait malgré que la Russie combattait l’Allemagne et l’Empire ottoman aux côtés de la France et de la Grande-Bretagne.

 

L’endiguement systémique de la Russie a commencé en 1917 et s’est renforcé après la Seconde Guerre mondiale (1939-1945) afin de contenir le communisme. Les Occidentaux avaient une peur viscérale de la menace communiste considérée comme une maladie contagieuse qui risquait de se propager et d’infecter l’Europe occidentale et le monde entier. Toutefois, la Russie d’aujourd’hui n’est plus un État communiste. Elle ne se réclame même pas d’une idéologie qu’elle voudrait répandre au reste monde comme les Occidentaux qui prônent le libéralisme. La coalition occidentale contre la Russie repose pourtant sur le postulat que le régime de Vladimir Poutine est une autocratie alors même qu’il a été régulièrement élu à la tête de la Fédération de Russie et bénéficie encore jusqu’à présent d’un taux d’approbation supérieur à 80 %.

 

Quoi qu’il en soit, il y a aujourd’hui une guerre en cours entre l’Ukraine soutenue par l’Occident, principalement les États-Unis d’Amérique et ses alliés, d’une part, et la Russie, d’autre part. Cette guerre est menée sur plusieurs fronts. Il y a le front militaire, le front économique, le front politique et le front diplomatique. Sur chacun de ces fronts, les faits sont en défaveur des Occidentaux. L’Occident pensait qu’avec son soutien à l’Ukraine, la Russie serait rapidement défaite militairement sur le terrain en Ukraine, détruite économiquement, déstabilisée politiquement et isolée diplomatiquement. Contrairement aux attentes occidentales, la Russie contrôle presque la totalité de la région du Donbass et de nombreuses autres villes clés de l’est de l’Ukraine. En outre, à la suite des sanctions, l’économie russe montre une meilleure performance que celle des économies occidentales qui non seulement ont des difficultés à faire face à l’inflation et à la pénurie mais aussi sont menacées de récession selon les récents chiffres du FMI. Le Président Vladimir Poutine est plus populaire que jamais. Enfin, la Russie continue d’entretenir des relations très chaleureuses et amicales avec la Chine, l’Inde, les économies émergentes du Sud, y compris avec l’Afrique.

 

Malgré cette défaite sur tous les fronts de la guerre, il est incompréhensible que l’Occident continue de s’opposer à toute idée de dialogue avec la Russie afin de trouver une solution pacifique au conflit. Cet aveuglément des Occidentaux pousse à se poser la question s’ils vont commencer un jour à avoir un sens clair de la réalité et comprendre que leur politique ne fonctionne pas. Cette attitude occidentale qui nous a conduit aux hostilités en cours peut-elle vraiment nous aider à trouver une solution appropriée et durable à la guerre?

 

On aurait pu espérer que le président français Emmanuel Macron en venant à Cotonou en République du Bénin fasse part aux Béninois d’idées concrètes sur la manière de mettre fin au conflit et, par conséquent, aux sanctions occidentales visant à punir la Russie. En fait, comme partout ailleurs dans le monde, les Béninois ordinaires souffrent des conséquences économiques de cette guerre et il n’est pas évident qu’ils soient disposés à entendre un discours qui ne recherche pas la résolution diligente de cette crise.

 

Monsieur Macron doit donc cesser de à se faire des illusions sur le peuple de la République du Bénin qui parmi tant d’autres, souffre de l’inflation et de la pénurie de biens à l’échelle mondiale et donc n’a aucune oreille pour ses lamentations au sujet de la Russie. Le peuple pacifique de la République du Bénin ne veut pas être entraîné dans une croisade anti-russe et il n’acceptera jamais qu’on lui dise quoi penser de la Russie car si Monsieur Macron peut déclarer que la Russie est le dernier empire colonial restant, qu’en est-il de la France qui  prétend que nous autres Africains n’avons pas la capacité de juger par nous-mêmes qui devraenit être nos amis et qui ne devraient pas?

 

Au Cameroun, il a déjà échoué à rallier l’opinion publique à sa cause. La société civile camerounaise l’a mise en déroute en exigeant que la France se prononce sur les plusieurs abus de son passé colonial dans le pays. Il a apparemment dû partir plus tôt que prévu dans son agenda du Cameroun pour le Bénin où il a repris avec les mêmes messages appelant l’Afrique à couper toute relation avec la Russie. Le reste du monde est fatigué du paternalisme occidental. Cette attitude occidentale de complexe de supériorité est à l’origine de la crise mondiale et, à moins que l’Occident ne change de cap, toute perspective pacifique devant nous sera impossible.

Auteur de l'article :


Alfred Cossi CHODATON
alf2chod@gmail.com Diplômé en sciences et technologies de l'information documentaire, il est un écrivain et analyste indépendant.

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